Ressources numériques en sciences humaines et sociales OpenEdition Nos plateformes OpenEdition Books OpenEdition Journals Hypothèses Calenda Bibliothèques OpenEdition Freemium Suivez-nous

Saison 11 : “Il était plusieurs fois les bains publics…”

S11 – #01

Annoncée à la fin de la saison 10, la dernière saison de « Bains-douches : l’Enquête ! » est en forme de radio. Mais pas seulement. Avec la dernière année du projet, l’histoire s’est mise en forme. Il était une fois les bains publics…

S11 – #02

Le travail de l’historienne est encore et aussi celui de raconter des histoires. Pour Bains Publics, elles prendront les formes d’une série documentaire radiophonique et d’un livre d’histoire un peu particulier.

Alors la saison 11 de « Bains-douches : l’Enquête ! », c’est parti. Suite et fin d’un projet de recherche postdoctoral en quatre années, à l’Université libre de Bruxelles.

S11 – #04

Le projet d’une création sonore était présent depuis le début. Elle remonterait peut-être même à ma découverte en 2011 des documentaires audios de La Fabrique de l’histoire. La petite robe bleue d’« une robe à soi » ressurgit de temps à autre dans mon esprit.

S11 – #05 

Alors avec ma collègue Pauline (du projet HyPer), on décide de se lancer. Depuis 2019, on collecte des témoignages et on cherche à les enregistrer dans des conditions audibles.

C’est nouveau pour nous. Entre ZOOM H5 et micro-cravate, on découvre la prise de son.

S11 – #06 

Mes appels répétés aux histoires d’eau chaude n’ont pas fonctionné.

On repassera pour la campagne d’histoire orale mais en attendant, une poignée de témoignages archi précieux nous permettent d’imaginer le récit de la série documentaire.

S11 – #07

Surtout, l’appel à candidature du FACR donne un coup d’accélérateur au projet.

Accompagnées par l’ACSR, on monte un dossier, on demande un budget, on affine le découpage et le séquençage, on traite des matières sonores, on rédige un synopsis et on monte une équipe de réalisation.

S11 – #08 

On est début mars 2021 et on va attendre juin 2021 pour avoir une réponse. Mais positive ou négative, on se dit qu’on y va. Dans la boite on a déjà Chantal, Alexandrina, Nadia, Fabienne, Christelle, Coulouko, Martin et dernières trouvailles de Pauline : Aloys et Alfred.

S11 – #09

Mais c’est gagné, le FACR accepte de nous financer !

Guillaume Abgrall est notre premier équipier, canif radiophonique, grâce à qui on rencontre Sébastien Schmitz pour la musique et Roxane Brunet pour le mixage. On planifie un calendrier. « Corps sales // Ville sèche », on y est presque.

S11 – #10 

Oui, presque, enfin…il ne reste plus qu’à retranscrire des heures et des heures d’interview, les écouter, et les ré-écouter, choisir les morceaux et monter sauvagement les premiers fragments sur Reaper.

Deuxième coup d’accélérateur, une semaine de résidence bricolée à Marseille.

S11 – #11

De notre studio improvisé au Vallon des Auffes on voit peu la mer tellement on passe d’heure à « dérusher » et à écrire des « Ours » et des notes explicatives de nos Ours…

S11 – #12

Oui, on reste universitaires quand même, un peu coincées dans l’écrit, les tableaux et les fichiers textes.

On n’aura pas complètement réussi à tout lâcher du premier coup. Mais, vraiment, Guillaume, on te jure, on essaye !

S11 – #13 

En parallèle, Guillaume a entrepris à Bruxelles des prises de son sur le terrain.

En suivant Alfred de son appartement aux Bains de Bruxelles, un vendredi chez DoucheFlux ou un mercredi à Rolling douche, les décors et les mouvements s’accumulent.

S11 – #14 

De notre côté, de retour de Marseille, on s’essaye à la prise de son expérimentale des bruits de l’eau.

S11 – #15

Brosse à dent, savon, cruche et gant de toilette, tout y passe. Peut-être bien que Sébastien pourra en tirer quelque chose…

S11 – #16

Avec une jolie valse d’allers-retours, et quelques cheveux en moins pour Guillaume, parce qu’on est deux et qu’on a des idées très précises, présentons-le comme ça, « Corps sales // Ville sèche » prend forme.

S11 – #17 

Entre mai et juin 2022, l’ACSR nous accueille dans ses studios pour l’enregistrement des voix off, le montage et le mixage des épisodes.

S11 – #18

J’ai adoré ces journées de travail, tellement différentes de celles de la chercheuse universitaire que je suis.

L’intensité du travail, le rythme toujours à la course, les blagues et les tocs de chacun·e, le travail d’équipe…

S11 – #19

Et ça y est, on n’y croyait pas, mais le mixage est bouclé. La sortie officielle de la série ce sera au Jacques Franck, le 29 septembre 2022. Après ça, rendez-vous sur toutes les plateformes de podcast. On ne manquera pas de vous tenir informés.

S11 – #20 

Et en passant, merci à @GariDatti, notre illustrateur pour les magnifiques mises en dessin des épisodes et de la série !

S11 – #21 

Entre les journées consacrées à la réalisation du documentaire, ma dernière année de post-doc aura été aussi remplie de dossiers de financement pour espérer une suite de carrière académique.

En juin,

après 6 mois d’attente,

les verdicts tombent.

S11 – #22 

Le FNRS a refusé mon projet « Habiter la Mine. Expériences de charbonnage (Belgique, 1900-1959) » pour un mandat de Chargée de Recherche de 3 ans à l’ULB. Pourtant classé A, j’essuie selon la formule consacrée un « Rejet de la proposition faute de moyens financiers ».

S11 – #23 

Faire l’histoire sociale de la classe ouvrière belge et son volet charbonnier, envie venue au cours de mon enquête sur les bains publics, sujet tellement mobilisé dans le récit national et tellement mal connu, ce n’est pas pour tout de suite.

Ou pas pour moi.

C’est un peu dur.

S11 – #24

Pourtant, les retours sont plutôt constructifs mais avec ce paradoxe désormais si commun d’encourager un projet en n’accordant pas les moyens de l’améliorer. Qui peut se permettre d’attendre encore un an et puis un autre ou encore un autre ?

Je n’ai pas encore tranché si ce sera moi.

S11 – #25 

Au FNRS, plusieurs jours avant de recevoir une lettre de refus à son nom, on peut parcourir, avec angoisse, la liste des projets acceptés. C’est une expérience assez désagréable. Sur base des prénoms, je compte 40 projets portés par des femmes contre 78 par des hommes et 2 prénoms indéfinis.

S11 – #26 

C’est le seul critère calculable sur base de cette liste et mon seul os à ronger. S’il ne dit pas que le FNRS a un biais de sélection, il raconte les inégalités de genre dans le monde de la recherche. Un monde académique accueillant pour les femmes est encore à inventer.

S11 – #27 

Bon mais la bonne nouvelle, c’est qu’avec Ananda Kohlbrenner et Chloé Deligne, on a reçu le prix Wernaers pour la vulgarisation scientifique de l’exposition « Oh ! Ça ne coule pas de source… ». On est hyper contente de cette reconnaissance pour ce travail de diffusion des connaissances.

S11 – #28 

Oui parce que même si on dit aux scientifiques qu’ils doivent partager les résultats de leur recherche, le temps et les moyens que ces démarches demandent sont rarement octroyés et reconnus. Alors vraiment, cela nous réjouit.

S11 – #29 

Alors ce prix, les plus de 4000 visiteur·ses et les retours enthousiastes et intéressés, quelle belle réussite !

S11 – #30

Et une autre bonne nouvelle arrive :

le deuxième dossier de candidature déposé, une « bourse d’Excellence du WBI.World », pour un projet de recherche d’un an à l’Université d’Ottawa, renouant avec mes anciens amours de vieilles folles en institutions, a été accepté.

S11 – #31

C’est moins long, plus loin, un peu moins « prestigieux »… mais ce qui est heureux, et méritant d’être mentionné, c’est l’accord de WBI International de reporter le départ d’un an pour raison familiale.

S11 – #32

Prestigieux ou pas, le projet est enthousiasmant, vertigineux. Quatre saisons au Québec, Canada nous revoila ?

Reste à voir comment se combinent, pratiquement, mobilité académique et vie familiale.

De quoi vivre, en chair, un enjeu majeur des inégalités genrées des carrières des jeunes chercheur·ses.

S11 – #33 

Alors en attendant de voir plus clair sur quelle carrière abandonner ou inventer, retour au concret.

Quitte à terminer un projet qui sera peut-être le dernier, autant le terminer en beauté. La collection MSH des Éditions de l’Université de Bruxelles a accepté de publier mon livre.

S11 – #34

Je travaille sur le manuscrit depuis plus d’un an avec quelques soirées tardives…

S11 – #35 

…et quelques moments de contemplation en rêvant à toutes ces personnes anonymes qui font l’histoire.

S11 – #36

La sortie de l’ouvrage est déjà annoncée ici. En plus de la partie 1 « Bains Publics : l’histoire », le livre reprendra dans sa partie 2 « Bains Publics : l’enquête », l’intégralité du contenu de cette enquête en ligne.

S11 – #37 

Dans la juxtaposition des deux récits, celui des bains publics et celui de l’historienne en train de faire une histoire, je vois une réflexion plus large sur l’écriture historienne et ce qui fait ce métier.

S11 – #38 

Entre vulgarisation et archive de la recherche, les deux récits donnent la possibilité de faire des liens,

de dire ce qu’il faut pour faire recherche, pour faire savoir, pour faire science, pour faire histoire.

S11 – #39 

Alors, « Il était plusieurs fois les bains publics »,

si répétition il y a, ce n’est que pour mieux déplier les histoires à raconter.

S11 – #40 

« Bains-Douches : l’Enquête ! », avec un peu d’émotion, c’était la dernière saison.

Merci de les avoir suivies.

Il est temps pour l’historienne en peignoir de bain de trouver un nouvel espace, à l’université ou ailleurs, duquel faire ressurgir les expériences de celles et ceux qui avaient laissés peu de traces.

S11 – #41

Et je vous laisse en compagnie de Sylvia Plath qui dit mieux que moi pourquoi l’histoire des baignoires a fait tellement sens pour moi…

S11 – #42

C’était “Bains-douches: l’Enquête!”, une histoire en train de se faire, en 11 saisons et 4 années de post-doc à l”Université libre de Bruxelles. MERCI !